Samuel Morin était assoupi dans l’autobus de l’Océanic de Rimouski mercredi quand il a été tiré de son sommeil par l’impact provoqué par un accident. Il y en a ensuite eu un autre. Puis un autre.
Sur la route devant mener l’équipe à Sherbrooke, où Morin et son coéquipier Frédérick Gauthier allaient disputer leur dernier match avant de partir pour le camp final d’Équipe Canada junior, une tempête de neige venait de causer un carambolage qui avait forcé l’immobilisation complète de l’autocar.
« Je me suis réveillé et tout ce que j’entendais, c’était ‘boom!’, ‘boom!’, ‘boom!’ », racontait le jeune homme, un peu fripé par deux longues journées d’attente, lors de son arrivée à Toronto le lendemain.
Si les bonzes de Hockey Canada ont invité Morin à la dernière étape du processus de sélection visant à former l’équipe qui tentera de ramener le pays sur le podium lors de la période des Fêtes, c’est parce qu’ils ont bon espoir que l’anecdote racontée par le défenseur format géant soit prémonitoire.
En étant toutefois bien au courant de ce petit détail : sur la glace, Morin ne subit pas les collisions. Il les distribue.
Ils sont plusieurs colosses au camp d’ÉCJ. Neuf des dix défenseurs invités font au moins 6 pieds. Chez les attaquants, Nick Ritchie (6’2.5’’), Nick Paul (6’3’’), Lawson Crouse (6’4’’) et Gauthier (6’4’’) en imposent.
Mais Morin, un choix de première ronde des Flyers de Philadelphie, les observe tous de haut. Et il est en très conscient.
« Je regarde la formation, il n’y a pas d’autre joueur de 6 pieds 7 pouces. Je suis le plus gros, je suis le plus grand. Si je pratique mon style de jeu – que je suis solide défensivement tout en étant physique – je pense que j’ai une chance de faire l’équipe », prédisait humblement le natif de St-Henri.
Rouillé ?
Morin est gros et fort, mais il n’est pas invincible. En octobre, à son cinquième match de la saison avec l’Océanic, il a reçu en plein visage un tir sur réception d’un joueur des Remparts de Québec. Le choc lui a fracturé la mâchoire, lui infligeant une douleur comme il n’en avait jusqu’alors jamais connue dans sa jeune carrière.
Durée de la convalescence : six semaines. Il les a toutes passées à Philadelphie, où il a pu garder la forme sous la supervision des thérapeutes de l’équipe qui l’a repêché.
« C’était long! Ma face est revenue comme avant, mais elle était pas mal déformée à un moment donné. Je ne pouvais pas manger, j’ai perdu du poids. C’était difficile », se rappelle celui qui fait maintenant osciller la balance à 222 livres.
Morin a raté un total de 13 matchs en plus des deux parties de la Série Subway qui opposait une équipe d’étoiles de la LHJMQ à une collection de jeunes vedettes russes. Même s’il n’a disputé qu’une douzaine de rencontres cette saison, il n’a jamais craint que la malchance lui coûte la chance de se faire valoir à l’échelle nationale.
« J’ai connu un bon camp l’automne dernier avec les Flyers, ça avait bien été. Et je sais que Benoît (Groulx, l’entraîneur du Canada), m’aime bien. Je pense qu’il veut me laisser une chance, alors je vais essayer de la prendre et d’en profiter », promet Morin, qui s’entraîne présentement avec un protecteur facial complet.
Incapable de se tailler une place au sein de l’équipe qui a dû se contenter d’une quatrième place l’an dernier en Suède, Morin n’est pas en terrain inconnu à Toronto. Il a déjà représenté le Canada à maintes reprises depuis l’âge de 15 ans et plusieurs visages lui sont familiers parmi ceux qu’il côtoie depuis maintenant quelques jours.
Lorsqu’il a remporté l’or chez les moins de 18 ans, il formait une paire de défenseurs avec Josh Morrissey, un choix de première ronde des Jets de Winnipeg. Il a aussi retrouvé Travis Sanheim, un autre choix au repêchage des Flyers avec qui il s’est lié d’amitié au camp des recrues de l’équipe l’été dernier.
Depuis l’ouverture du camp, Morin est jumelé à l’Ontarien Chris Bigras, qui tente de conserver sa place acquise au sein de l’équipe nationale l’année dernière.
Gauthier, un vétéran sans garanties
Frédérick Gauthier, l’autre représentant de l’Océanic dont le dossier est à l’étude dans les bureaux des dirigeants d’ÉCJ, se retrouve dans la même situation que Bigras. Lui aussi faisait partie de l’édition qui s’est inclinée contre les Russes en demi-finale en janvier dernier et cherche à gagner sa place pour la revanche.
Candidat pour un rôle d’attaquant à caractère défensif, ce spécialiste des mises en jeu ne croit pas que le bagage supplémentaire qu’il trimballe lui vaudra quelque faveur particulière de la part des entraîneurs.
« C’est pareil pour tout le monde. L’expérience, je ne pense pas que ça va affecter leur décision. On part tous sur le même pied », réalise le vétéran.
Pour Gauthier non plus, la route vers Toronto n’a pas été de tout repos. Au camp des recrues des Maple Leafs, il a subi une sournoise blessure aux côtes en encaissant un double-échec et a été incapable de reprendre l’action avant la mi-octobre, six semaines après le début de la saison dans la LHJMQ.
Puis en fin de semaine dernière, il a perdu la partie inférieure de ses deux « palettes » en recevant un coup de bâton en pleine bouche. « Les deux premières que je perds au hockey! », lance-t-il en riant.
Avec tout ça, Gauthier montre 14 points au compteur après une quinzaine de parties.
« Je me vois comme un centre efficace dans les deux sens de la patinoire, mais je travaille encore sur mon jeu offensif. J’aimerais pouvoir apporter cette facette de mon jeu cette année, mais avant tout, je veux poursuivre dans la même voie qui m’a permis d’être ici. »
Depuis le début du camp, Gauthier pivote un trio avec Nick Ritchie, des Petes de Peterborough, et Jake Virtanen, des Hitmen de Calgary.
« Ce sont deux bons gars. C’était la première fois qu’on jouait ensemble, mais ça patinait pas mal. Je trouve qu’on se voit bien sur la glace. »