Échaudée par les recours judiciaires qui se multiplient, la Ligue de hockey junior majeur du Québec (LHJMQ) entend se défendre avec «fermeté et conviction». Son commissaire se dit prêt à aller devant les tribunaux, s'il le faut, pour ne pas devoir verser de salaire aux joueurs.
«Nos joueurs, on ne les considère pas comme des salariés. Ce sont des athlètes amateurs et étudiants, tonne le commissaire de la LHJMQ, Gilles Courteau. Ce qu'on leur verse par semaine, c'est sous forme de bourse d'encouragement aux études. Sinon, on couvre la pension, les études et les déplacements.»
La Presse a révélé vendredi qu'une demande de recours collectif était déposée contre la LHJMQ en Cour supérieure du Québec cette semaine. La requête fait valoir que les joueurs sont des salariés, mais sont payés en deçà du salaire minimum depuis des années. Elle réclame 50 millions en dommages punitifs.
Vendredi après-midi, la poursuite n'avait toujours pas été signifiée à la LHJMQ. «On attend toujours les documents», a expliqué M. Courteau.
La requête fait valoir que les joueurs «travaillent» de 35 à 40 heures par semaine en moyenne et «jusqu'à 65 heures». En contrepartie, ils reçoivent une indemnité - un «salaire», selon la poursuite - de 60 $ par semaine, en plus de la pension.
Cette charge de travail est liée au niveau élevé du calibre, note M. Courteau. «À cause de son statut élite, le joueur a un calendrier de 68 matchs, des entraînements et doit aller à l'école», explique-t-il.
Il croit que payer les joueurs nuirait à la mission de la LHJMQ. «Ce serait difficile de garder nos jeunes à l'école alors qu'ils auraient l'impression de gagner leur vie avec le hockey. Mais ce n'est pas le cas, assure M. Courteau. C'est une ligue de développement. L'étape qui précède le hockey professionnel.»
«Si ça ne fonctionne pas au hockey, on a un programme de bourses d'études aux niveaux universitaire, collégial ou professionnel», poursuit le commissaire.
Une cause crédible, selon des experts
Selon six avocats spécialisés en droit du travail et de la fiscalité, les recours collectifs contre la LHJMQ et la Ligue canadienne de hockey (LCH) s'appuient sur des bases solides. Ces experts consultés par le Toronto Star estiment que les joueurs sont des salariés.
Vendredi, une troisième requête a été déposée, cette fois contre la Western Hockey League (WHL). Le joueur derrière cette poursuite de 60 millions est Lukas Walter, celui-là même qui poursuit la LHJMQ. Au cours de ses trois ans dans le hockey junior, Walter a joué dans les deux ligues.
L'année dernière avec les Sea Dogs de Saint-Jean, Walter touchait une indemnité de 476 $ par semaine, selon la poursuite. Les joueurs de 20 ans pouvaient toucher jusqu'à 560 $ la saison dernière, contrairement aux joueurs de 16 à 19 ans.
La poursuite allègue que c'est la preuve du statut de salarié des joueurs. Cette saison, la LHJMQ a ramené la somme à 150 $ par semaine. Gilles Courteau assure que la décision n'a pas été prise dans le but de se protéger contre une poursuite.
«Jusqu'à l'an dernier, nos joueurs de 20 ans étaient considérés comme recevant un salaire. Parce qu'à 20 ans, le joueur avait l'occasion d'aller jouer au hockey professionnel dans la Ligue américaine ou la ECHL, donc c'est ce qui nous a amenés à avoir cette situation-là jusqu'à l'an passé», note le commissaire de la LHJMQ.
Mais l'indemnité a été revue à la baisse par souci d'uniformité, plaide-t-il. «En tant que ligue amateur, on voulait que tout le monde soit sur un pied d'égalité», dit-il.
Gilles Courteau dit se demander si des gens ou des groupes se cachent derrière ces recours.
«On se pose la question. Il y a deux ans, c'étaient les frères Randy et Glenn Gumbley derrière la démarche de syndicalisation. Il y a eu Georges Laraque au Québec, rappelle Gilles Courteau. On se souvient tous comment ça s'est terminé.»