Il ne devait pas y avoir de match. Sa victoire, le Danemark l’avait célébrée deux jours plus tôt en méritant la première qualification de son histoire pour les quarts-de-finale du Championnat mondial de hockey junior.
Il ne devait pas y avoir de match et il n’y en a pas eu. La fausse méfiance poliment démontrée par les joueurs canadiens dans les jours menant au duel inégal s’est mise à sonner encore plus faux à mesure que le suspense se transformait en malaise, vendredi au Air Canada Centre.
Pointage final : 8-0. Et ça aurait pu être bien pire.
« C’était trop pour nous, a bien résumé le pilote danois, Olaf Eller. Peut-être qu’on avait épuisé tout ce qui nous restait d’énergie pour nous rendre à ce point. Nos joueurs étaient peut-être un peu brûlés et certainement impressionnés par la vitesse et la robustesse du Canada. »
« Pour être honnête, j’étais très nerveux avant le match de ce soir, a pourtant insisté Benoît Groulx. Leur premier trio pourrait être le premier trio de n’importe quelle équipe, ils ont un bon gardien et connaissaient beaucoup de succès en avantage numérique. C’était une combinaison très dangereuse. »
Mais le Canada aussi compte sur quelques combinaisons dangereuses. Comme celle formée par Connor McDavid (1-2) et Curtis Lazar (2-1), qui ont mené l’attaque des vainqueurs avec une récolte de trois points chacun.
Sam Reinhart, Lawson Crouse, Brayden Point, Nick Paul et Nick Ritchie ont aussi trouvé le fond du filet. Les Canadiens ont lancé 50 fois sur les gardiens Georg Sorensen et Thomas Lillie. Ce dernier a fait son entrée dans le match après le septième but.
Avec un effort de 14 arrêts, Zachary Fucale a signé son deuxième jeu blanc en trois départs. Le gardien montréalais n’a cédé qu’une fois sur 54 tirs depuis le début du Mondial, mais son brio n’a pas incité son entraîneur à changer ses habitudes. Après le match, Groulx n’a pas voulu nommer son gardien pour le prochain match des siens.
Avant même de sauter sur la glace, les Canadiens savaient qu’une victoire leur permettrait de retrouver de vieilles connaissances en demi-finale. En début de soirée, la Slovaquie a battu la République tchèque 3-0 pour se qualifier pour le carré d’as.
Le Canada avait amorcé son tournoi avec une victoire de 8-0 contre la Slovaquie. Les deux équipes s’affronteront de nouveau samedi à 20 h. L’autre demi-finale mettra aux prises la Suède et la Russie à 16 h.
« Je me souviens après notre match contre la Slovaquie, j’étais assis à côté de leur entraîneur qui racontait que ses joueurs avaient été un peu impressionnés par le Centre Bell, mais il avait promis qu’ils s’amélioreraient. Le lendemain, ils battaient la Finlande et depuis, ils connaissent un excellent tournoi », a rappelé Groulx.
« La victoire qu’on a eue contre eux ne va rien changer, je pense qu’il ne faut pas y penser. Ils ont quand même battu les Tchèques, ils ne sont pas là pour rien. Il va falloir les prendre au sérieux », prévient Frédérik Gauthier, qui a récolté son premier point du tournoi vendredi.
« C’est sûr qu’il faut oublier ça, approuvait le défenseur Samuel Morin. Ils ont fait du progrès depuis le premier match. Ils sont bons défensivement, ils ne perdent plus 8-0. C’est un piège, mais Ben va bien nous préparer. »
« Je ne dirais pas qu’il faut effacer complètement ce premier match de notre mémoire, mais c’est important d’être conscients que les Slovaques représentent une bien meilleure équipe aujourd’hui, clarifie Reinhart. Lors du premier affrontement, si on ne connaît pas un début de match du tonnerre, le résultat est peut-être bien différent. Il faudra démonter autant d’intensité et espérer obtenir le même résultat. »
Benoît Groulx a dû composer avec une formation réduite quand Robby Fabbri est tombé au combat en début de rencontre. Utilisé sporadiquement lors des trois matchs précédents, Point s’est immédiatement retrouvé sur le trio de Lazar et McDavid tandis que Jake Virtanen a pris place aux côtés de Nick Paul et Nic Petan.
Après la rencontre, Groulx a confirmé que Fabbri avait subi une entorse à une cheville et que son tournoi était terminé.
Une résistance de dix minutesOn avait beau tenter d’imaginer les scénarios les plus loufoques, le seul espoir du Danemark de réaliser un miracle reposait probablement sur les épaules de Sorensen. Si le petit gardien jouait le match de sa vie, peut-être que…
Les plus imaginatifs y auront cru pendant quelques minutes. Il n’y avait que 15 secondes d’écoulées au cadra que Sorensen avait déjà attiré l’attention en ayant le meilleur sur Josh Morrissey et Max Domi. À défaut de marquer, Morrissey a poursuivi ce qui est devenu sa propre tradition du temps des Fêtes en envoyant Mikkel Aagaard sur le derrière d’un solide coup d’épaule.
Nikolaj Ehlers a obtenu la première bonne chance de marquer du Danemark lorsqu’il a filé seul vers Fucale après un revirement causé par Shea Theodore. Mais plutôt que de viser l’ouverture entre les jambières comme il l’avait laissé entendre en matinée, le représentant des Mooseheads de Halifax a dirigé son lancer directement dans la mitaine de son ancien coéquipier.
Après une période, Ehlers revendiquait la moitié des six tirs au but de son équipe.
À l’autre bout, Sorensen a continué de vivre au-dessous de ses moyens. Il a fermé tout angle de tir à Anthony Duclair sur une descente en vitesse du Montréalais et a sorti le biscuit contre Lazar sur un tir de l’enclave.
Mais ce qui devait arriver arriva. À la dixième minute, McDavid est arrivée en hâte sur l’aile gauche, a contourné le filet adverse et, tout en trébuchant, a relayé le disque à Lazar qui a trouvé le trou entre le poteau et la jambière gauche du gardien.
Reinhart a doublé l’avance des favoris de la foule moins de cinq minutes plus tard. Héritant d’une rondelle envoyée en avant du filet par Duclair, l’espoir des Sabres de Buffalo est revenu en tête du classement des compteurs en enfilant son cinquième de la compétition.
« On savait qu’on devait être bon en début de match et j’ai trouvé qu’on avait connu un excellent départ », a apprécié Groulx.
La profondeur supérieure du Canada est devenue de plus en plus évidente à mesure que le match prenait de l’âge. En deuxième période, ça tournait depuis deux ou trois bonnes minutes en territoire danois quand Lawson Crouse, le cadet de la sélection canadienne, a converti son premier du tournoi.
Avec une facilité déconcertante, McDavid et Lazar ont creusé l’écart en se pointant chacun leur tour seul devant le pauvre Sorensen. McDavid a déculotté sa victime en feintant d’aller sur son revers tandis que Lazar, propulsé en échappée par une bombe de Joe Hicketts, s’est contenté de faufiler le disque où Ehlers avait promis de le faire.
Paul, Point et Ritchie ont complété le spectacle en troisième.
« C’est une étape de plus pour nous. On s’approche du but », rêvassait le sélectionneur canadien pendant que son confrère se préparait à faire une place dans ses valises pour des souvenirs impérissables.
« Nos trois semaines au Canada ont été formidables. On ne s’attendait pas à être traités de la sorte. Dès le départ, les amateurs se sont rangés derrière nous et ça nous a donné des ailes », a affirmé Olaf Eller, reconnaissant.