Le 28 mars 2012, Brayden Point a marqué au début de la deuxième période de prolongation pour donner aux Warriors de Moose Jaw une victoire de 5-4 et une avance de 3-1 dans leur série de première ronde contre les Pats de Regina.
Deux semaines plus tard, le 11 avril, Point a récidivé. Son but en or, inscrit après neuf minutes de temps supplémentaire, a envoyé les Tigers de Medecine Hat en vacances après une courte série de quatre matchs.
Quand les Warriors ont finalement baissé pavillon au tour suivant, Point avait 10 points au compteur, dont sept buts. Il venait tout juste d’avoir 16 ans, mesurait 5 pieds 6 pouces, pesait 124 livres et avait à peine disputé plus de matchs dans la Ligue junior de l’Ouest qu’il n’y avait de bougies sur son dernier gâteau d’anniversaire.
Alors non, Alan Millar n’est pas surpris d’entendre que trois ans plus tard, son poulain fait écarquiller les yeux au camp de sélection d’Équipe Canada junior.
« Le reste du pays est en train de découvrir ce que nous avons la chance de voir à chaque jour. Il est bon, n’est-ce pas? », demandait de façon rhétorique le directeur général des Warriors lors d’un récent entretien téléphonique avec RDS.
Point est effectivement très bon. On ne récolte pas 91 points en 72 matchs, comme il l’a fait l’an dernier, par pur hasard. On n’apparaît pas non plus sur le radar de l’équipe nationale sans posséder un talent certain.
Mais voilà, depuis bientôt une semaine, le petit gars de l’Alberta ne se contente pas de faire acte de présence sous les yeux de ceux qui doivent juger de sa valeur en vue du prochain Championnat du monde.
Il a grandi et a pris du coffre depuis ses débuts au hockey junior, mais il demeure le plus petit spécimen à se démener pour se tailler une place parmi les 22 joueurs qui représenteront leur pays à partir du 26 décembre à Montréal. Il est pourtant l’un des plus voyants. Alors que les cinq joueurs assurés de former le noyau offensif d’ÉCJ avaient obtenu congé en fin de semaine dernière, Point a été le meilleur attaquant des siens lors de deux matchs préparatoires organisés contre une formation de joueurs universitaires ontariens.
Il a récolté un but et une aide dans la première partie au cours de laquelle il a été jumelé à Michael Dal Colle et Jason Dickinson. Benoît Groulx l’a qualifié de « travailleur acharné » après sa performance de trois points aux côtés des colosses Nick Ritchie et Frédérik Gauthier le lendemain.
« Je ne savais pas qu’il pensait ça à mon sujet, mais c’est un beau compliment! Celui-là fait plaisir », a répondu Point, un peu gêné, lorsqu’il a été mis au parfum des propos de son entraîneur.
Fausse modestie? Pas selon Millar, qui connaît Point depuis qu’il en a fait son tout premier choix au repêchage dans ses fonctions de DG des Warriors.
« Il n’est pas le genre de jeune homme à rechercher les projecteurs ou à s’enfler la tête avec un compliment. Il est humble et calme, mais animé par une grande confiance. Toute sa vie, il a dû prouver qu’il n’était pas trop petit pour relever le prochain défi. Tout ce qu’il fait, il le fait déjà comme un pro. »
Point, qui a été sélectionné en troisième ronde par le Lightning de Tampa Bay lors du dernier encan de la Ligue nationale, semble être partout à la fois pendant chacune de ses présences sur la patinoire. Sa routine : traquer la rondelle, la récupérer et la redistribuer au bon endroit sans perdre une seule seconde. Vous perdez sa trace? Cherchez le petit objet noir. Il n’en est jamais bien loin.
On le revoit encore voler le disque à un adversaire dimanche dernier, pivoter, feinter et entourlouper trois rivaux avant de repérer Dal Colle de l’autre côté de l’enclave et de lui servir une sublime passe soulevée. Ce dernier ne semblait pas croire ce qu’il venait de voir après avoir marqué ce qui était sûrement l’un des buts les plus faciles de sa carrière.
« Son intelligence, son esprit de compétition et son talent compensaient largement pour son petit gabarit quand on l’a vu jouer pour la première fois, se souvient Millar. Il trouve toujours un moyen d’être près de la rondelle, il gagne ses batailles contre des joueurs beaucoup plus gros, il va dans les coins et en ressort plus souvent qu’autrement gagnant. »
« Toute ma vie, j’ai été le plus petit, raconte Point. Je me suis fait sonner les cloches plus d’une fois, mais vient un temps où on développe des trucs pour avoir le dessus. C’est clair que je ne remporterai jamais une épreuve de force, alors je m’efforce d’incorporer la vitesse dans toutes les facettes de mon jeu. »
Ignoré lors de la tenue du camp estival d’ÉCJ, Point a connu une saison du tonnerre pour finalement être contacté par l’état-major de la sélection nationale. En plus d’amasser 44 points en 29 matchs, il a excellé lors de deux matchs de la Série Subway qui opposaient les étoiles de la WHL à plusieurs des meilleurs joueurs juniors de la Russie.
« Avant qu’il parte, je lui ai lancé ce message : ne change absolument rien », partage Millar. En jouant comme il le fait toujours avec nous, tout ira bien pour lui. Souvent, un jeune joueur arrive dans un environnement comme celui dans lequel il se trouve présentement et pense qu’il doit faire quelque chose de spectaculaire à chaque présence de chaque période de chaque match. Mais les hommes qui sont en charge de construire cette équipe sont très futés. Ils savent reconnaître l’éthique de travail et apprécier les petites choses que Brandon est reconnu pour faire. »
Et Millar, même si son équipe peine à jouer pour ,500, avait une dernière chose à ajouter à son meilleur joueur.
« Je lui ai dit que je ne voulais pas le revoir avant le 6 janvier. »